samedi 2 mai 2009

19/09/2007 Jour 1

Me voilà donc projetée dans cet univers inconnu que celui des cités. Le collège, oui, j'ai connu ça, et ce n'est pas si loin. J'en garde un souvenir un peu flou de profs débordés, de boutonneux moqueurs et obsédés sexuels, de dindes gloussantes et d'une cantine dégueulasse.

Je me souviens aussi de quelques personnalités importantes : Difool, sur skyrock, surement le prof d'éducation sexuelle le plus respecté et écouté. Drazic pour les filles, qui faisait réver avec son légendaire piercing à l'arcade dans Hartley coeur à vif.

Et même si je me doute que les taquineries des garçons et le regard froid des filles de mon ex collège n'est rien comparé à ce qui m'attend, je ne sais pas vraiment comment "ils" sont. Ces gamins de banlieue dont on dit qu'ils se jettent des compas à la figure pendant les cours, qui maltraitent les jeunes professeurs tout fraichement diplomés. Au fond, je n'en sais rien.

Je crois que je n'ai jamais été faite pour aller au collège : je n'ai jamais eu d'appareil dentaire, de boutons, et pas assez de nénés pour titiller les hormones de nos charmants princes de l'époque. Et même maintenant, je n'ai pas assez de sens pratique pour penser à prendre un pantalon avec une braguette qui marche pour mon premier jour...

Donc, jour 1. Mercredi 19 Septembre.

Le CPE, Gilles, me donne rendez-vous à 7h45 à l'établissement. 7h45, c'est relativement très tôt, n'est-ce-pas, mais je me rassure en me disant qu'une fois là-bas, je serai réveillée par la force des choses.

En effet. La première tache de la journée consiste à ouvrir le portail, et à vérifier que chacun des petits poussins n'a pas oublié son carnet de liaison. Si c'est le cas, on le note dans un cahier, et, s'il reitère cet oubli, il recevra du travail supplémentaire. N'oublions pas que nous sommes en ZEP profonde, et que l'on peut être sûr que si on ne prend pas cette précaution, les gamins affirmeront toujours l'avoir oublié en cas de souci.

Premier rapport avec les autres surveillants, très sympa. On me demande si je suis bien Coline, on m'explique joyeusement ce que j'ai à faire, on me propose du café... Puis, au boulot. Je pars donc ouvrir le portail avec ma collègue, Jeanne, petite brune dynamique qui salue chacun des élève en les appellant par leurs prénoms. Luxe que l'on peut s'offrir : nous sommes dans un collège "ambition réussite", qui compte 210 gamins seulement.

Elle me prévient rapidement : "Ils vont tous vouloir savoir qui tu es... c'est de l'animation, une nouvelle pionne !"

Ca ne manque pas. Les plus timides me dévisagent, alors que la plupart demandent à Jeanne :

- C ki ça?

- Tu n'as qu'à le lui demander toi-même", répond-elle gentiment.

- T ki?

Je me présente au moins 50 fois : "Je m'appelle Coline, je suis une nouvelle surveillante, et toi, tu t'appelles comment?"

Beaucoup de jeunes essaient de forcer le passage au portail, de passer sans nous présenter leur carnet. Jeanne et moi essayons de faire un barrage tant bien que mal.

Plus tard dans la matinée, des 3emes de sexe masculin me demandent à nouveau qui je suis. Après explication, l'un d'entre eux me répond "Ah, dommage, g cru ke t'étais une nouvelle dans la classe"

Arf. On m'avait prévenu que je faisais jeunette, mais bon.

Les filles, parfois, n'attendent même pas de savoir qui je suis pour me prévenir d'un détail embarrassant : "Eh madame... Ta braguette elle est ouverte! "

Gloussements.

"Je sais, je répond : (Elle est cassée)" Miséricorde. J'avais oublié à quel point les filles ont un oeil de lynx pour tout ce qui concerne la tenue vestimentaire.

Cette braguette m'aura au moins aidé à me faire connaitre de beaucoup de demoiselles.

Une dame de service me dit qu'il faut savoir se faire respecter ici, au risque d'être submergée. Elle rajoute même : "Ici, ils le savent. Ils disent : "La dame au lunettes, faut pas y aller avec elle" Ceci m'apprendra au moins que je resterai surement pour beaucoup de jeunes filles : "La nouvelle à la braguette ouverte."...

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